Image

Pour 4 soirs seulement, soit du 23 au 26 mars, Les Grands Ballets présentent un programme double très fort et puissamment émouvant dans le Jeune Homme de Mozart en première partie et du vibrant Requiem de Brahms en deuxième partie.
Si vous n'aviez qu'un seul spectacle à voir cette année, courez voir ce chef d'oeuvre du chorégraphe Andrew Skeels, qui a créé cette œuvre puissante, profonde et magnifiquement émouvante sur la musique du Requiem de Brahms! C'est toute une expérience artistique et humaine qui attend les spectateurs!
En première partie, l'allégresse, la légèreté et la mélancolie de Mozart sont bien représentées par la chorégraphie de Jeunehomme d'Uwe Scholz. Créée en 1986 par le grand et regretté chorégraphe allemand, cette pièce pour 21 danseurs est articulée autour de six couples du corps de ballet et de deux couples qui interprètent chacun un pas de deux. Elle se conclut par un soliste de grand talent qui interprète Mozart lui-même. C'est une pièce toute en élégance, qui rappelle un peu les Menuets de Mozart et les danses de la seconde partie du XVIII ème siècle, où l'on dansait beaucoup. La chorégraphie donne lieu à de gracieux et élaborés mouvements qui sont autant d'exploits de virtuosité. Les costumes et le décor, tout en sobriété, laissent toute la place aux danseurs qui se déploient, telles les fleurs d'un jardin, tout au long de ce long concerto pour piano no. 9 en mi bémol majeur. Cette pièce, composée alors que Mozart n'avait que 21 ans, constitue son premier chef d'oeuvre, et marquera un tournant dans la carrière du compositeur de génie.
Un entracte de 20 minutes sépare bien les deux parties très différentes du spectacle.
Le Requiem de Brahms, chorégraphié par Andrew Skeels
Brahms avait écrit son Requiem suite à la mort de son très grand ami et mentor Robert Schumann, en 1856. Il est alors anéanti. Dix ans plus tard, sa mère décède également. C'est alors qu'il crée la seconde partie de son Requiem.
L'oeuvre du chorégraphe Skeels
Le Requiem de Brahms, chorégraphié par le génial Andrew Skeels, est une œuvre d'une grande et profonde puissance, qui nous prend littéralement aux tripes. Tout au long de cette pièce de quelque 70 minutes, les danseurs se meuvent presque toujours en grand groupe, telle une armée d'Humains souffrants, en quête de rédemption, de réconfort et d'un souffle de vie. Accablés par la douleur, ils sont au sol, recroquevillés sur eux-mêmes, et tentent péniblement de se relever. Mais la force du malheur et des vicissitudes de la vie les fait retomber au sol. Cette condition de mortels, ne pouvant échapper à leur destin commun, crée cependant de la réciprocité, de l'aide et de l'empathie entre eux. Ils font les mêmes gestes, qui se répercutent d'un à l'autre...Ils tentent de se soutenir, de se réparer entre eux. Quelle poignante démonstration de notre condition humaine!
Les danseurs, tous habillés d'un costume gris représentant le corps humain (colonne vertébrale en évidence) forment un groupe compact, faisant les mêmes gestes, parce que liés par un destin commun, à l'image de l'instinct grégaire qui caractérise les humains. Lorsque pris individuellement, ils témoignent de leurs souffrances par des gestes saccadés, vaines tentatives de réparation. Il y aurait tant à dire sur cette représentation!
L'orchestre joue également un rôle extrêmement fort et important. Les plaintes des chanteurs solistes, exécutées souvent presque a cappella, déchirent le cœur par leur expressivité. Et que dire du décor? Magique et tellement représentatif de l'oeuvre : une lune voilée et une énorme branche d'arbre mort qui définit bien le contexte.
Personnellement, j'ai vu dans cette œuvre moderne l'apocalypse qui nous attend avec le réchauffement de la planète : des humains qui tentent de respirer, tout simplement. Des humains totalement désorientés qui tentent de survivre dans un monde devenu invivable, irrespirable. Des humains qui ont, malgré tout, la force de se réconforter, de se venir en aide...
Cette œuvre phare restera longtemps gravée dans la mémoire de ceux qui l'auront vue.
Un coup de chapeau très bas à Adam Johnson, fabuleux chef d'orchestre, Ivan Cavallari, directeur artistique des Grands Ballets, Soliste soprano : Jacqueline Woodley | Baryton solo : Dominique Côté | Décors et costumes : Marija Djordjevic | Tous les danseurs et musiciens des Grands Ballets.
Danseurs... vous êtes fabuleux! Quelle force, quelle énergie, quel talent!
Crédit photo : Sasha Onyshchenko
A voir jusqu'au 26 mars au Théâtre Wilfrid Pelletier, PDA
https://www.grandsballets.com/