« Traces d'étoiles » au Rideau Vert ou L'art de parler pour ne rien dire...

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Critique

Jusqu'au 10 juin prochain, le Théâtre du Rideau Vert (TRV) présente une pièce de l'auteure américaine Cindy Lou Johnson, écrite en 1989. La traduction est de Maryse Warda et la mise en scène, de Pierre Bernard. D'une durée d'une heure trente sans entracte, elle met en scène deux personnages : Rosannah DeLuce (Mylène Mackay) et Henry Harry (Maxim Gaudette).

Cette pièce, selon moi, non seulement traite-t-elle de l'absurde, mais elle utilise aussi l'absurde pour y parvenir...

Ce huis-clos a lieu dans une petite maison typique du Grand Nord : une maison perdue dans l'enfer blanc de la neige et du froid cinglant. On situe l'action en Alaska. Une jeune femme arrive, tout essoufflée, peinant à refermer la porte derrère elle, tant le blizzard est violent à l'extérieur. Elle est habillée en robe de mariée et petits souliers de satin (tout à fait improbable dans cet endroit du monde). A l'intérieur, un jeune homme est étendu sur son lit. Dans un long monologue, la femme, totalement hystérique, répète à l'envi qu'elle a conduit sans arrêt pendant 5 jours, ne sachant où elle allait, et ne s'alimentant que de barres de chocolat. Puis, elle perd connaissance et dort pendant 2 jours. Lorsqu'elle se réveille, commence alors une discussion vraiment étrange entre les deux protagonistes. Les sujets discutés se répètent de nombreuses fois, sans donner plus d'explications. L'homme explique qu'il a fait brûler les souliers de la femme dans le four, durant qu'elle dormait. Il ne sait pas pourquoi il a fait ça; il s'en excuse ad nauseam, et elle répond ad nauseam aussi « que ce n'est pas grave »... Bon. Autres sujets de conversation : D'où vient la femme? Pourquoi est-elle arrivée ici en robe de mariée? Et que cherche-t-elle? Encore là, à travers des centaines de paroles, on ne réussira à avoir que ces piètres réponses : Elle allait se marier, dans l'un des États les plus au sud des États-Unis, mais elle a plutôt reculé sur le parvis de l'église. Elle ne sait pas pourquoi. Elle a pris le volant et a conduit non-stop jusqu'en Alaska. Pourquoi? Elle ne le sait pas non plus. Elle apparaît plutôt comme une personne perdue et névrosée. Elle dit qu'elle se sentait « projetée » vers l'avant; elle croit aux extra-terrestres et autres idées aussi farfelues. L'homme a de la difficulté à « la suivre » et répète souvent ses mêmes questions, auxquelles il n'obtiendra jamais de réponses. Durant toute la pièce, on se demande où ils veulent en venir avec ces mêmes questions, mille fois posées et ces non-réponses, mille fois données. En fait, malgré les milliers de mots prononcés, ils disent toujours la même chose. On tourne en rond constamment. L'art de parler sans ne rien dire, finalement!

Donc, à travers tout cela, on apprendra que l'homme vit seul, a un enfant et travaille dans le nord. Elle, a fui son mariage, et c'est à peu près tout ce qu'on saura. L'homme désire cette femme, mais, du côté de cette dernière, la réponse est à l'image de tout le reste : ambivalente. C'est un « je le veux aussi, mais je ne le veux pas ». Ainsi, c'est une histoire d'attraction-répulsion.

Bon, je sais que l'auteure a voulu dire quelque chose à travers cette pièce, mais moi, franchement, c'est un deuxième degré que je n'ai pas perçu. Au mieux, je dirais que ce sont deux solitudes qui se rencontrent : une qui sait où elle s'en va (l'homme) et l'autre qui ne le sait pas du tout, (la femme) et qui est fortement perturbée psychologiquement.

Saluons le talent des deux comédiens, qui ont très bien joué leur rôle!

Comme dans tout spectacle au Québec, la foule a offert une ovation debout, mais ça, on sait que c'est un rituel sacré au Québec, depuis quelques années. Que l'on aime ou pas un spectacle, on se lève debout pour applaudir.

Crédit photos : François Laplante-Delagrave

https://www.rideauvert.qc.ca