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Première sortie de Radical Pop Music, le label d’Etienne Daho, Le condamné à mort, initialement mis en musique par Hélène Martin, ce long et troublant poème — dont Etienne Daho a longtemps interprété un extrait sur scène, Sur mon cou — est ici chanté et récité par Jeanne Moreau et Etienne Daho, qui signe par ailleurs les arrangements musicaux de la « chanson-trame sonore ».
Écrit en 1942 alors qu’il était incarcéré à la prison de Fresnes pour vol, Le condamné à mort est la première œuvre littéraire de l’écrivain, poète et dramaturge français Jean Genet. Le texte raconte l’histoire de Maurice Pilorge, un jeune assassin guillotiné le 17 mars 1939 à Saint-Brieuc, personnage complexe, objet de fantasmes qui exerça sur Genet une réelle fascination.
Extraits d’un entretien de Jeanne Moreau et Etienne Daho avec Albert Dichy, directeur de l’IMEC :
Q : Jeanne Moreau, vous avez croisé l’œuvre de Jean Genet à diverses reprises, vous avez été l’héroïne du film Mademoiselle dont il avait écrit pour vous le scénario, vous avez également joué un rôle important dans Querelle de Fassbinder et vous voilà aujourd’hui, auprès d’Etienne Daho, dans Le condamné à mort. Quelle relation aviez-vous avec lui?
Jeanne Moreau : J’ai connu Jean Genet vers la fin des années 1950, il me semble, par des amis communs. Je ne sais plus bien comment les choses se sont passées, mais il y a eu très vite entre nous une sorte de complicité. [...] On s’amusait beaucoup, il était drôle, vivant. D’où venait cette complicité? Je ne sais pas, mais peut-être avait-il senti que son univers ne m’était pas inconnu… [...] Il aimait rire, plaisanter, mais il y avait en lui quelque chose de fermé, de mystérieux. Avec une sorte de cruauté, comme lorsqu’on dit de quelqu’un qu’il a un cœur de pierre. Il était capable de dire des choses exquises et, tout à coup, d’être d’une extrême brutalité. Genet, c’était un diamant noir! Ça existe, vous savez, les diamants noirs, personne n’a envie d’en porter sur une bague. Mais c’était ça son génie, cette capacité à pénétrer les âmes, à voir la vilenie et à la transformer en beauté.
Q : Etienne Daho, sans l’avoir connu, vous avez vous également un long compagnonnage avec Genet, comment la rencontre s’est faite pour vous?
Etienne Daho : Ma rencontre s’est faite d'abord par la musique, probablement parce que c'est un langage qui m'est plus immédiat, plus familier. J’avais entendu David Bowie évoquer son admiration pour Genet et j'ai longtemps cru que sa chanson The Jean Genie lui était dédiée. Les punks de ma génération et les « auteurs » du rock, tels que Bowie ou Patti Smith ont aussi revendiqué son héritage et en ont fait un héros. On retrouve souvent dans le rock, les fantasmes de la dangerosité, du drame, du sexe, mais aussi le côté théâtral et flamboyant que l'on peut retrouver dans l'œuvre de Genet. Ce fut la première clé. J'ai ensuite découvert l'album Le condamné à mort remarquablement mis en musique par Hélène Martin et interprété par Marc Ogeret, que nous reprenons avec Jeanne aujourd'hui. J'ai été très impressionné par ce texte charnel et poétique qui est comme une corde tendue par le désir.
Jeanne Moreau et Etienne Daho
Le condamné à mort de Jean Genet
Mis en musique par Hélène Martin
Sortie le 16 novembre
1. À Maurice Pilorge, assassin de 20 ans
2. Le vent qui roule un cœur
3. Ö la douceur du bagne…
4. La chanson qui traverse
5. J’ai tué…
6. Rocher de granit noir…
7. Madame écoutez moi…
8. Sur mon cou…
9. Les assassins du mur…
10. Un clop mouillé…
11. T’enveloppent si fin…
12. Élève-toi dans l’air…
13. Pardonnez-moi mon Dieu
14. J’ai dédié ce poème…
(Source : Naïve)