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L’argument de la pièce est simple : Simon, un jeune agent publicitaire et trentenaire doit renoncer à une affaire pour se présenter à l’enterrement de sa mère. De retour au bercail, il retrouvera par la même occasion une faune féminine aussi déjantée qu’elle révèlera peu à peu ses propres démons. Simon sortira-t-il du placard? Est-ce ceci? La mort de sa mère lui permettra-t-elle de dépasser « sa mythologie familiale »? Et de trouver qui il est?
Les lectures sont nombreuses tant la proposition est ouverte. J’y lis une comédie sur la solitude héritée de l’individualisme et la déshumanisation ordinaire dans le matérialisme. Malaise plus enraciné que l’invention oedipienne sous l’emprise du non-dit, ou que l’inscription de soi dans la socialité. Dans le thème même, on déborde le roman familial et les indications du texte. Révélation forte du jeu.
La socialité entre les personnages est fragmentée se traduisant entre eux en poussées irrésistibles et irrépressibles. Leur interaction, quasi provoquée, se voit immédiatement refoulée par un effet de distanciation, de jeux de miroirs.
La vie de soi et de l'autre sont rêvées,évanescentes - guère plus que la réalité d'une image - tant chacun est en représentation de lui-même. La mise en scène privilégie ici la chorégraphie, le flux musical et le louvoiement pour marquer ce point de chute – de rupture en fait. On ne dénote chez les personnages aucun centre, aucune consistance, à moins qu’on ne leur prête une consistance de désir, décentré. Ce sont des êtres infiniment enveloppés de l’extérieur et en eux-mêmes, sans ancrage. Bientôt la douce enveloppe n’est plus qu’aliénation.
L’univers de cette scène est aseptisé par des constructions pathologiques de désir. On s’en rend vite compte. Le réel s’est vidé de sa substance. L’action à distance de la société consumériste sur les personnages est pressentie dans leur perversion.
Au delà du comique, ou même du cynique, il faut voir, la vue laisse agir sur elle, la contention horrifiante du visage sous le latex du plus-que-visage ne laissant qu’apparaître la bouche « botoxée » en guise d’orifice fétichisé. Inquiétante étrangeté de Sarah parmi autres choses.
Simon comme quelqu’un d’autre est pris entre ce qu’il voudrait et ce qu’il ignore qu’il désire auquel il prête un visage de chien. Le désir reste une nostalgie sans réconfort de l’animalité simple de la bête. Le saura-t-il?
Avec : Anne-Marie Cadieux, Marie-FranceLambert, Micha Lescot, Maria de Meidoros, Johanna Nizard et Jutta Johanna Weiss.
Collaboration spéciale
J.-S.BOISVERT
Sextett à l’Espace Go jusqu’au 6 février 2010