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Paul Barbeau, producteur. Nom connu de l’industrie québécoise. Avec NùFilms, il a produit, au début des années 2000, quelque 700 clips musicaux dont ceux de Céline Dion, Arcade Fire, Martha Wainwright, Daniel Lanois et bien d’autres. Or, à l’hiver 2009, NùFilms se voit contraint de fermer ses portes en raison du téléchargement illégal qui force les maisons de disques à renouveler leur façon de commercialiser la musique. L’homme derrière la compagnie qui s’était mérité plusieurs nominations aux MMVA’S, aux Victoires de la Musique, aux Grammy Awards et au Gala de l’ADISQ se retrouve alors devant un grand vide.
« Je me suis demandé ce qu’on pouvait laisser dans cette société basée sur le volume. Comment cristalliser en un mot, une phrase ou un geste ce qu’on fait une fois sur terre. », s’est-il dit. Au temps de NùFilms, il avait aussi fondé sa propre boîte de productions cinématographiques indépendantes, d’où sont sortis Jo pour Jonathan, un des meilleurs films québécois des dernières années, et Roméo Onze. C’est ainsi que naît en lui l’idée de Paul Barbeau, réalisateur.
Après la neige, premier film, relate donc ces faits. Parsemée d’éléments fictifs, l’histoire est tout de même grandement inspirée de cette période de la vie du producteur. Mission accomplie pour Paul Barbeau lorsqu’il est question de laisser sa trace. L’homme a fait un Xavier Dolan de lui-même en enfilant tellement de rôles, soient ceux du scénariste, du réalisateur, du personnage principal (Simon) et du producteur de Après la neige. On salue donc le courage, la détermination et la volonté que requiert un tel travail. « Je sais que je prends un grand risque, mais au fond de moi, j’ai le sentiment que le geste est plus important que le résultat. » a avoué Paul Barbeau. À vrai dire, il n’aurait pu mieux décrire son processus cinématographique. Car, en effet, le résultat ne rend malheureusement pas honneur à sa volonté.
Triste réalité, Après la neige déçoit donc à plusieurs niveaux. D’abord, le film manque de rythme. Dû à un faible financement ou a un choix de réalisation, je pose la question, plusieurs scènes ne sont pas assez découpées. On assiste alors à des plans trop longs qui coupent le souffle du récit. Dans un même ordre d’idées, un trop plein de séquences démonstratives de la solitude du personnage principal devient rapidement répétitif puis, inutile. Par ailleurs, le récit s’en sortirait plutôt bien si ce n’était pas de la dernière partie du film où l’on assiste à une américanisation de l’histoire avec un séjour à New-York rempli d’ambitions en lien avec une vedette du rap et tout le tralala. Maintenant. Au niveau de l’interprétation, Pierre Barbeau ne convainc pas. On ne doute pas un instant de son bon vouloir faire, mais l’homme n’est pas un acteur et en tant que personnage principal, la faille est donc importante pour le film. Par contre, ses acolytes tirent très bien leur épingle du jeu. Le jeune Émile Schneider-Vanier, que l’on voit pour la première fois au grand écran, livre une interprétation du fils de Simon absolument honnête et sensible. Nous le reverrons très bientôt, sans aucun doute. Isabelle O’Brien, qui campe l’ex de Simon, et Jean Larouche, en vieux père de ce dernier, font également un très bon travail pour servir le scénario.
Après la neige, tournée en 18 jours (!), est finalement une oeuvre personnelle dont Pierre Barbeau aura raison d’être fier. Malgré ses nombreuses lacunes, il faut reconnaître ici le courage d’un homme qui s’est lancé tête première et dont le but de départ était de laisser sa trace. À ce niveau, c’est réussi.
À l’affiche dès aujourd’hui.
Maude McConnell-Legault